Gaëtan Bille, le jeune vététiste
Les Gaumais, ces durs au mal…
« Notre obsession, c’était le VTT »
Stokkem, puis Fouches. Le décor est planté dans ces petits villages arlonnais. Dès l’âge de six ans, Gaëtan aime jouer au football avec les copains, ou…faire un tour à vélo. « Les jeux vidéos, c’était pas mon truc…et avec mes amis du village, notre obsession, c’était le VTT: tous étaient impatients de pouvoir s’en payer un à la grande communion ».
Ce qui fut chose faite pour le jeune fouchois: « Je m’en souviens bien, un Specialized en alu…grâce à ce magnifique cadeau, j’ai commencé à prendre part à des randonnées« . A l’époque, les randos VTT dominicales de la Gaume remportaient un beau succès, elles ont ensuite subi les contraintes de la peste porcine.
Rapidement, Gaëtan se prend au jeu de la compétition. « Quand tu es avec les autres randonneurs, tu ne te laisses pas dépasser... ». Une attitude qui le conduit inexorablement vers ses premières vraies compétitions: « Vers 12-13 ans, j’ai participé à deux reprises au Grand Raid Godefroid de Bouillon, seule compétition du coin, un circuit de 40 km (organisé au mois de septembre) ». Grâce à une belle performance, il a l’opportunité de rencontrer Cédric Moyen: « Il est le premier à me proposer d’intégrer un club, pour faire les « Ardennes-Gaume », équivalent des courses de l’ECW bien connues en région liégeoise, en différents formats de course, mais surtout en VTT. J’avais donc mis le pied à l’étrier, et les week-ends sont devenus bien chargés. A 14 ans, je participais à des épreuves toutes catégories confondues, donc au contact de mecs qui avaient 30-35 ans. Une bonne manière de s’aguerrir ».
L’année suivante, Gaëtan est cadet seconde année (débutant à l’époque) et il est aligné sur des manches de la Wallonia Cup ou de la Coupe de Belgique, une marche de l’escalier en plus. « Je suis même devenu champion de Wallonie, devant Sébastien Carabin, il avait un an de plus que moi…lui a continué dans le VTT… A cette époque, il y avait aussi David Piva, qui a obtenu plus tard un contrat Rosetta, il a vraiment explosé dans la catégorie des juniors ».
La première année en juniors s’avère plus compliquée pour le jeune Bille, ses parents et ses pairs… « Il faut pouvoir s’imaginer la difficulté que représentait le fait d’habiter à Arlon ou la Gaume, en général. Les courses avaient lieu la plupart du temps en Flandre, il fallait donc se lever à cinq heures du matin, partir à plusieurs dans une même voiture; pour les habitants du coin, par rapport à d’autres coureurs, notamment flamands, l’investissement des parents était énorme. Aujourd’hui, j’aime bien pouvoir discuter avec des gars qui proviennent de cette région, car je trouve leur parcours remarquable…notamment pour les entraînements, ils sont tellement esseulés, ce n’est pas comme en région liégeoise où plein de petits groupes se forment. Et puis, durant l’hiver, les conditions sont dures…ceci dit, cela forge le caractère. Le meilleur exemple actuel, pour moi, c’est Arnaud De Lie, qui se retrouve un peu dans le même contexte ».
La structuration du cyclisme gaumais, et par extension de la province du Luxembourg, Gaëtan estime qu’on la doit à Laurent Mars, au sein du CC Chevigny. « Une fois qu’il a repris le club avec Anthony Hubert, les entrainements se sont véritablement organisés, les parents ont pu confier leurs enfants avec plus de sérénité, ce qui leurs enlevait aussi bien des contraintes ».
Des débuts sur route au VC Ardennes
Sur le plan sportif, Gaëtan est moins performant durant cette première année junior: c’est le moment où il se tourne vers la route. « A l’époque, j’étais pote avec Benjamin Mars, le frère de Laurent, qui courait pour le VC Ardennes. L’équipe avait un très beau programme à l’international. Après s’être interrogés sur mes réelles capacités, les membres du staff ont fini par m’accepter et à 18 ans, je débutais mes premières courses sur route« .
Et le premier apprentissage primordial, c’est « apprendre à frotter... Les entraînements collectifs, auxquels je n’étais pas habitué, m’ont aidé, mais surtout les premières courses, comme ces trois jours sur l’Etoile du Sud-Limbourg, face à des coureurs flamands…il s’agit de s’adapter très vite ».
Et très vite aussi, Gaëtan s’améliore. En mai 2006, il gagne sa première course, le championnat provincial, et ensuite des « kermesses ». Mieux encore, à la fin du mois d’août, il parvient à s’imposer dans le très relevé GP Paganessi, en Italie, une course internationale classée 1.1 juniors à l’UCI, où était notamment aligné le champion du monde de l’époque, un certain Diego Ulissi. « En Italie, on a fait plusieurs courses, Diego gagnait et moi j’étais à chaque fois dans les premières places, je me sentais bien ».
« Junior seconde année, c’est le tournant dans ma carrière, c’est d’ailleurs souvent le cas chez les jeunes ». Les parents de Gaëtan étaient contre le fait que leur garçon ne fasse que du vélo… « Pour eux, les études étaient primordiales. Pour leur faire plaisir, j’ai commencé des études d’éducation physique, mais moi je ne voyais qu’une seule chose, devenir coureur pro... d’ailleurs, j’étais plus souvent sur mon vélo que sur un banc d’école à cette époque ».
Les parents du jeune fouchois finissent, l’année suivante, par lui donner la chance de se concentrer sur le vélo: « J’étais tellement heureux que je me suis entraîné comme un dingue durant l’hiver. J’ai parcouru la Gaume de long en large et de large en long, je ne sais pas combien de kilomètres j’ai pu faire, mais c’était vraiment violent…à l’ancienne, sans capteurs de puissance, des heures et des heures passées sur la selle ».
Contrat Rosetta et Tour de l’Avenir
Dans la catégorie espoirs, Gaëtan peut jouir d’un programme séduisant: « En plus de ce que proposait déjà le VCA, la fédération Wallonie-Bruxelles a vraiment mis les moyens, notamment avec les stages de préparation et des courses en Espagne. D’un niveau particulièrement élevé. Je ne suis pas certain qu’il y en avait de l’équipe qui était à l’arrivée, mais on apprenait énormément et lorsque nous revenions sur les courses belges, les progrès étaient évidents ».
En 2010, le jeune fouchois, devenu soumagnard d’adoption (même si ses grands-parents maternels étaient bien originaires de Soumagne) obtient son premier contrat « Rosetta », au même titre que des gars comme Kevin Van Melsen, Edwig Cammaerts, Fabio Polazzi, Thomas Degand ou encore Jonas Van Genechten « Ce fut un véritable soulagement, car les deux années précédentes, je n’avais pas de revenus, et c’était vraiment galère… ce contrat, cela m’a permis de payer mon quotidien, les déplacements en voiture, etc. « . A l’époque, Gaëtan roule pour le Pesant Club Liégeois. La même année, il se fait remarquer dans ce que l’on peut considérer comme l’épreuve la plus prestigieuse de la catégorie, le Tour de l’Avenir. « Jean-Pierre Dubois m’a donné ma chance, en tant qu’équipier. Notre leader, c’était Yannick Eijssen, qui a porté le maillot jaune durant plusieurs jours. Cette année-là, c’est Andrew Talansky qui s’était imposé devant Nairo Quintana. Du TOP 10, nombreux sont ceux qui ont percé ensuite ».
Du groupe belge, certains ont ensuite été engagés chez Quickstep, d’autres chez Topsport Vlaanderen, et Gaëtan commence aussi à intéresser les dirigeants d’équipes pro. Et c’est Yves Vanassche qui va lui permettre de parapher son tout premier contrat professionnel: « Il m’avait appelé pour me dire surtout ne signe rien, on monte un projet… ». Quelques semaines plus tard, était créée la première équipe pro Wallonie-Bruxelles.
Photo Rudy Rouet
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